Lutter autrement contre le cancer

Entretien posté sur le site www.la-maison-du-cancer.com

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LMC : Nombre de personnes ressentent un sentiment aigu de culpabilité lorsqu’ils apprennent leur état cancéreux. Pourquoi ?

Thierry Janssen : La maladie constitue une période chaos intense, nous perdons nos repères, nos certitudes s’évanouissent et notre impression de toute-puissance se révèle être une illusion. Cela nous fragilise, nous redevenons alors comme un petit enfant, dépendant, et nous espérons rencontrer une autorité qui détient les solutions pour notre survie. Nous remettons donc volontiers notre pouvoir à autrui, aux soignants que nous voyons comme des parents. De plus, influencé par une pensée magique enfantine, nous avons tendance à croire que si la maladie nous pénalise c’est parce que nous avons fait quelque chose de mal. Ce sentiment de culpabilité ne recouvre aucune réalité. Au lieu de culpabiliser, l’adulte que nous sommes devrait plutôt assumer sa responsabilité face à la maladie. Car, il n’y a pas d’effets sans causes. La plupart du temps, nos maladies et a fortiori les cancers sont d’origine multifactorielle. Souvent la multitude et la complexité des causes impliquées nous dépassent. Cela ne devrait pas nous décourager car seule une meilleure compréhension des synergies à l’oeuvre entre toutes ces causes pourra nous permettre de réduire le nombre des malades. Ainsi, par exemple, on sait que le tabagisme est une cause de cancers du poumon ; la dépression psychologique quant à elle ne provoque pas de cancers du poumon ; mais le tabagisme allié à une dépression est beaucoup plus cancérigène que s’il est pratiqué par des individus non dépressifs. Ce n’est qu’un exemple, qui ne tient pas compte de toute une série d’autres facteurs comme les pollutions environnementales ou des déséquilibres alimentaires. Au diable la culpabilité. Mais il est temps d’assumer nos responsabilités individuelles et collectives face aux cancers. Il est temps de penser à une vraie prévention.

LMC : Jusqu’où faudrait-il aller pour lutter contre ce fléau qu’est le cancer?

T.J. : Le vrai combat contre le cancer n’a pas encore réellement commencé. Nous inventons de nouveaux traitements, heureusement de plus ciblés et de plus en plus efficaces. Mais nous ne faisons pratiquement rien pour empêcher la genèse de cette maladie. Si nous devions réellement prendre les mesures qui s’imposent, la plupart de nos modes de vie actuels devraient être revus en profondeur, nos modes de productions, de consommations et, donc, de pollutions, devraient être abandonnés, toute notre civilisation moderne et occidentale devrait être remise en question. Vous imaginez les résistances, conscientes et non conscientes que cela induit. La question est de savoir si nous sommes vraiment prêts à assumer les conséquences d’un tel changement. Cela suppose que nous renouions avec nos besoins essentiels, c'est-à-dire un retour à une vie plus simple, et que nous soyons plus en lien avec la nature dont nous nous sommes coupés en oubliant que, pourtant, nous en faisons partie.

LMC : Aujourd’hui, les malades se voient-ils appliquer la meilleure des thérapies ?

T.J. : L’élaboration des « stratégies thérapeutiques » de la médecine scientifique moderne repose sur une logique guerrière. Celle-ci s’est élaborée sur les bases d’un postulat philosophique né au siècle des Lumières : l’être humain est en dehors de la nature, la nature est dangereuse et l’être humain doit utiliser son intelligence pour comprendre la nature dans ses moindres détails afin de la contrôler, de l’influencer, de la dominer. Une science analytique est née, découpant la nature en morceau, comme le corps humain, devenu un corps-objet. Le drame c’est qu’à force d’avoir tout analysé en détails, nous avons perdus la conscience des liens qui relient les différents éléments de notre analyse. Or, ce sont ces liens qui constituent le tissu du vivant. Forts de notre compréhension détaillée du corps humain et
de ses maladies, nous avons développé et produit une série de remèdes qui sont autant de solutions extérieures proposées à la consommation. Et nous oublions de rappeler aux malades qu’à côté de ces remèdes extérieurs nous possédons aussi de nombreuses ressources intérieures, un potentiel de prévention et de guérison qui reste sous-exploité. Nous oublions aussi d’écouter ce que la maladie vient nous dire, ce qu’elle demande de corriger dans les déséquilibres que nous nous imposons. Avant de combattre la maladie et d’agresser le corps qui en est le siège, nous devrions apprendre à agir en meilleure intelligence avec la nature qui nous entoure et dont nous sommes constitués, cette nature que nous sommes. Ceci dit, les traitements du cancer proposés par la médecine conventionnelle sont utiles et, pour le moment, offrent une sécurité dont il serait dommage de vouloir se passer. Ce n’est toutefois pas une raison pour ne pas y adjoindre des soins complémentaires qui, au lieu d’affaiblir l’organisme, cherchent à le renforcer.

LMC : Vous plaider donc pour une autre manière de soigner.

T.J. : Je plaide pour une « cancérologie intégrative ». Une cancérologie capable d’allier le meilleur de toutes les approches thérapeutiques disponibles – conventionnelles et non conventionnelles – est à souhaiter. Inévitablement, celle-ci serait plus sensibilisée à la prévention et ne considèrerait pas le cancer comme une anomalie isolée de son contexte. Contexte qui est plus que préoccupant. Il y a quelques années, j’ai rencontré un étudiant en médecine camerounais, inscrit en faculté de médecine à Paris, fils d’un guérisseur traditionnel dans son pays. « Depuis que j’étudie la cancérologie, je me rends compte que les êtres humains se comportent comme des cellules malignes, me dit-il. Animées d’une vitalité prodigieuse, ces cellules se multiplient en très grand nombre, détruisent le lieu de leur naissance, consomment toutes les ressources disponibles et se propagent à travers l’organisme. Guidées par une intelligence redoutable, elles s’infiltrent partout, résistent aux traitements utilisés pour les combattre, ne connaissent aucune limite à leur extension, et finissent par tuer le corps de la personne qui les nourries. Il suffit de contempler le désastre écologique pour comprendre que l’humanité est le cancer de la Terre. Nous devrions nous méfier car, privées de leur support, les cellules malignes meurent à leur tour. » Sagesse africaine que je laisse à votre réflexion.
 

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Thierry Janssen : La maladie constitue une période chaos intense, nous perdons nos repères, nos certitudes s’évanouissent et notre impression de toute-puissance se révèle être une illusion. Cela nous fragilise, nous redevenons alors comme un petit enfant, dépendant, et nous espérons rencontrer une autorité qui détient les solutions pour notre survie. Nous remettons donc volontiers notre pouvoir à autrui, aux soignants que nous voyons comme des parents. De plus, influencé par une pensée magique enfantine, nous avons tendance à croire que si la maladie nous pénalise c’est parce que nous avons fait quelque chose de mal. Ce sentiment de culpabilité ne recouvre aucune réalité. Au lieu de culpabiliser, l’adulte que nous sommes devrait plutôt assumer sa responsabilité face à la maladie. Car, il n’y a pas d’effets sans causes. La plupart du temps, nos maladies et a fortiori les cancers sont d’origine multifactorielle. Souvent la multitude et la complexité des causes impliquées nous dépassent. Cela ne devrait pas nous décourager car seule une meilleure compréhension des synergies à l’oeuvre entre toutes ces causes pourra nous permettre de réduire le nombre des malades. Ainsi, par exemple, on sait que le tabagisme est une cause de cancers du poumon ; la dépression psychologique quant à elle ne provoque pas de cancers du poumon ; mais le tabagisme allié à une dépression est beaucoup plus cancérigène que s’il est pratiqué par des individus non dépressifs. Ce n’est qu’un exemple, qui ne tient pas compte de toute une série d’autres facteurs comme les pollutions environnementales ou des déséquilibres alimentaires. Au diable la culpabilité. Mais il est temps d’assumer nos responsabilités individuelles et collectives face aux cancers. Il est temps de penser à une vraie prévention.

LMC : Jusqu’où faudrait-il aller pour lutter contre ce fléau qu’est le cancer?

T.J. : Le vrai combat contre le cancer n’a pas encore réellement commencé. Nous inventons de nouveaux traitements, heureusement de plus ciblés et de plus en plus efficaces. Mais nous ne faisons pratiquement rien pour empêcher la genèse de cette maladie. Si nous devions réellement prendre les mesures qui s’imposent, la plupart de nos modes de vie actuels devraient être revus en profondeur, nos modes de productions, de consommations et, donc, de pollutions, devraient être abandonnés, toute notre civilisation moderne et occidentale devrait être remise en question. Vous imaginez les résistances, conscientes et non conscientes que cela induit. La question est de savoir si nous sommes vraiment prêts à assumer les conséquences d’un tel changement. Cela suppose que nous renouions avec nos besoins essentiels, c'est-à-dire un retour à une vie plus simple, et que nous soyons plus en lien avec la nature dont nous nous sommes coupés en oubliant que, pourtant, nous en faisons partie.

LMC : Aujourd’hui, les malades se voient-ils appliquer la meilleure des thérapies ?

T.J. : L’élaboration des « stratégies thérapeutiques » de la médecine scientifique moderne repose sur une logique guerrière. Celle-ci s’est élaborée sur les bases d’un postulat philosophique né au siècle des Lumières : l’être humain est en dehors de la nature, la nature est dangereuse et l’être humain doit utiliser son intelligence pour comprendre la nature dans ses moindres détails afin de la contrôler, de l’influencer, de la dominer. Une science analytique est née, découpant la nature en morceau, comme le corps humain, devenu un corps-objet. Le drame c’est qu’à force d’avoir tout analysé en détails, nous avons perdus la conscience des liens qui relient les différents éléments de notre analyse. Or, ce sont ces liens qui constituent le tissu du vivant. Forts de notre compréhension détaillée du corps humain et
de ses maladies, nous avons développé et produit une série de remèdes qui sont autant de solutions extérieures proposées à la consommation. Et nous oublions de rappeler aux malades qu’à côté de ces remèdes extérieurs nous possédons aussi de nombreuses ressources intérieures, un potentiel de prévention et de guérison qui reste sous-exploité. Nous oublions aussi d’écouter ce que la maladie vient nous dire, ce qu’elle demande de corriger dans les déséquilibres que nous nous imposons. Avant de combattre la maladie et d’agresser le corps qui en est le siège, nous devrions apprendre à agir en meilleure intelligence avec la nature qui nous entoure et dont nous sommes constitués, cette nature que nous sommes. Ceci dit, les traitements du cancer proposés par la médecine conventionnelle sont utiles et, pour le moment, offrent une sécurité dont il serait dommage de vouloir se passer. Ce n’est toutefois pas une raison pour ne pas y adjoindre des soins complémentaires qui, au lieu d’affaiblir l’organisme, cherchent à le renforcer.

LMC : Vous plaider donc pour une autre manière de soigner.

T.J. : Je plaide pour une « cancérologie intégrative ». Une cancérologie capable d’allier le meilleur de toutes les approches thérapeutiques disponibles – conventionnelles et non conventionnelles – est à souhaiter. Inévitablement, celle-ci serait plus sensibilisée à la prévention et ne considèrerait pas le cancer comme une anomalie isolée de son contexte. Contexte qui est plus que préoccupant. Il y a quelques années, j’ai rencontré un étudiant en médecine camerounais, inscrit en faculté de médecine à Paris, fils d’un guérisseur traditionnel dans son pays. « Depuis que j’étudie la cancérologie, je me rends compte que les êtres humains se comportent comme des cellules malignes, me dit-il. Animées d’une vitalité prodigieuse, ces cellules se multiplient en très grand nombre, détruisent le lieu de leur naissance, consomment toutes les ressources disponibles et se propagent à travers l’organisme. Guidées par une intelligence redoutable, elles s’infiltrent partout, résistent aux traitements utilisés pour les combattre, ne connaissent aucune limite à leur extension, et finissent par tuer le corps de la personne qui les nourries. Il suffit de contempler le désastre écologique pour comprendre que l’humanité est le cancer de la Terre. Nous devrions nous méfier car, privées de leur support, les cellules malignes meurent à leur tour. » Sagesse africaine que je laisse à votre réflexion.
 


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